Pour sa 8e édition, Trendeo, Fives, l’Institut de la réindustrialisation et McKinsey s’associent et dévoilent les enseignements du Baromètre mondial des investissements industriels 2023. Celui-ci mesure depuis 2016 les tendances en matière d’investissements à l’échelle internationale, aussi bien dans des unités industrielles existantes que dans de nouvelles unités de production. Il identifie également les projets et réalisations qui contribuent au développement de « l’usine du futur », sur des critères technologiques et sociétaux : la flexibilité, la numérisation, l’efficacité énergétique, la protection de l’environnement, l’insertion dans l’économie locale et les conditions sociales. Parmi les enseignements clés :
• Les volumes d’investissements se stabilisent à l’échelle mondiale, à hauteur de 1 306 milliards de dollars ;
• Malgré une faiblesse des volumes, on observe une logique d’investissements vertueuse en Europe, avec des mesures spécifiques en matière d’environnement, de réduction de la consommation d’énergie et d’emploi de technologies numériques ;
• 54 % des investissements mondiaux sont en effet fléchés vers l’Asie, 28 % vers l’Amérique et seulement 10 % vers l’Europe.

« Notre étude 2023 met en évidence à la fois un retard européen en volume mais une avance incontestable dans la qualité des investissements. Cela trace un chemin souhaitable dans lequel, sans fléchir sur la qualité et notamment la prise en compte de l’investissement, l’Europe doit accroître ses volumes d’investissement. » David Cousquer, CEO et fondateur de Trendeo.

Une stabilisation des volumes d’investissements à l’échelle mondiale sur les 12 derniers mois, avec des disparités régionales fortes

En 2022, l’investissement industriel avait connu une baisse conséquente (de l’ordre de 20 % par rapport au premier semestre 2021), en partie imputable aux conséquences du conflit russo-ukrainien. Les 12 derniers mois filants ont quant à eux vu le volume d’investissements se stabiliser pour atteindre les 1 306 milliards de dollars. L’investissement industriel est même reparti légèrement à la hausse (+5 %), avec des volumes proches de ceux de 2021, confirmant la reprise amorcée post-covid, bien que l’on note une baisse de 15 % entre le deuxième trimestre 2022 et le premier trimestre 2023.

Ces chiffres consolidés masquent néanmoins de fortes disparités régionales. 54 % des investissements sont en effet fléchés vers l’Asie, avec une croissance significative des investissements en Corée du Sud et en Indonésie (respectivement +2 118 % et +211 %) et une chute nette des investissements en Chine. Bien que captant environ 30 % des investissements de la zone Asie, les investissements vers la Chine sont en baisse de 28 % par rapport à la dernière édition du baromètre. Le pays, qui subissait déjà une forte baisse des investissements étrangers depuis 2020, peine à remonter la pente avec des investissements qui avoisinent les 210 milliards de dollars par an, un montant en baisse de 16 % par rapport à la moyenne annuelle depuis 2016.

Seconde région bénéficiant des investissements industriels mondiaux : l’Amérique (28 %), et principalement les Etats-Unis (plus de 80 % des investissements sur la zone) qui bénéficient probablement des premiers effets de l’IRA.

L’Europe élargie, quant à elle, est en légère baisse, drainant environ 10 % des investissements mondiaux contre 12 % en moyenne sur la période 2016-2023. Si l’on regarde plus spécifiquement l’Union européenne, on observe une stabilité à hauteur de 7 %, à l’instar de l’an dernier. L’écart d’investissement sur l’Union élargie par rapport à la période précédente s’explique en partie par un décrochage du Royaume-Uni et de la Russie.

Une nette reprise des investissements manufacturiers

Avec 900 milliards d’investissement de juillet 2022 à juin 2023, les investissements manufacturiers sont en hausse de 10 % sur les douze derniers mois, soit 27 % au-dessus de leur moyenne annuelle depuis 2016.

Les investissements en faveur de la production d’énergie sont en baisse de 10 %, notamment dans les énergies renouvelables, avec une disparition de l’investissement en éolien offshore et une baisse très nette dans les énergies fossiles. Les batteries sont également en légère baisse mais très au-dessus de leur moyenne. On observe à l’inverse une hausse dans le solaire et la production d’hydrogène.

Les investissements dans les data centers (+72 %), les activités de gestion des déchets (+99 %) et la R&D (+509 %) sont en très forte hausse.

« Les conclusions de l’étude Trendeo, comme notre carnet de commandes record de 2,3MM€ fin 2022, s’expliquent par l’inflexion claire de tendances que je voyais venir depuis 2018 : décarbonation, digitalisation, automatisation, régionalisation. Fives bénéficie de la forte croissance des investissements en Amérique du Nord, avec notamment de grands projets d’automatisation. En Chine, le Groupe accompagne une industrie de plus en plus tournée vers la décarbonation. En Europe, où les nouveaux grands projets sont moins importants, Fives favorise la transformation du tissu industriel existant vers un modèle plus vertueux. » Frédéric Sanchez, Président de Fives.

Malgré une faiblesse des volumes, une forte qualité des investissements en Europe
Les montants des investissements européens dans l’industrie sont 40 % plus faibles que la moyenne mondiale (276 MUS$ par projet dans l’Union européenne contre 470 MUS$ au niveau mondial). Néanmoins, l’Union européenne dispose d’une capacité d’investissement domestique forte et présente une stratégie d’investissement vertueuse.

Loin devant les autres zones géographiques, les investissements européens annoncent des mesures spécifiques pour l’environnement dans 25 % des projets (14 % au niveau mondial) ainsi que des mesures de réduction de la consommation d’énergie dans 11 % des projets (6 % au niveau mondial). Également, 8 % des investissements précisent l’emploi de technologies numériques, soit un pourcentage équivalent à celui de la zone Amérique.

En France plus spécifiquement, les critères « Usine du futur » sont en hausse en 2023. Ils concernent notamment les efforts en faveur de l’environnement, la numérisation et l’efficacité énergétique.

« Le baromètre démontre la logique d’investissement vertueuse de l’Union européenne, favorable au renforcement de notre industrie du futur. C’est une excellente nouvelle. Si l’on se concentre sur la France, nous y voyons une opportunité de relocalisation industrielle, avec des atouts majeurs. Parmi eux, de grands champions mondiaux alimentant un tissu très solide et une dynamique de filières, l’accès aux marchés grâce à une situation géographique très favorable, la qualité de ses infrastructures, son vivier de talents, l’excellence de ses foyers de recherche et d’innovation, ou encore la possibilité de disposer d’une énergie décarbonée peu chère grâce à son mix énergétique. Tous ces éléments alimentent la puissance du « Label France ». » Matthieu Dussud, Directeur associé chez McKinsey France.

Les efforts en faveur de la décarbonation de l’industrie et en matière de production d’énergie se poursuivent, en particulier dans le nucléaire et le transport aérien
Dans le cadre du baromètre 2023, les observations ont été détaillées pour deux filières en croissance, toutes deux liées à la décarbonation de l’économie : celles des SMR et des carburants pour l’aviation durable. La filière des microréacteurs nucléaires se développe, avec un cumul d’environ 35 milliards de dollars d’investissements depuis 2016. Récemment, les carburants pour l’aviation durable (Sustainable Aviation Fuel, SAF) ont également connu une période de croissance. Les investissements enregistrés dans le domaine atteignent un montant cumulé de 12 milliards de dollars en 2023.

Enfin, une trentaine de filières ont déployé des projets de site de production intégralement décarbonés. Là encore, l’Union européenne est en première position pour la qualité de ses projets en matière de décarbonation.

Les investissements dans les efforts sociaux, un impératif majeur
Le baromètre analyse également le critère des « efforts sociaux », qui prend en considération différentes thématiques comme l’emploi local, le niveau de salaire proposé ou l’effort de formation. Ce critère retranscrit des réalités diverses selon les pays. Les projets indiens mettent davantage en avant l’emploi des femmes, tandis qu’aux Etats-Unis les subventions pour la formation soulignent les difficultés de recrutement sur les métiers en tension dans un pays où règne le plein emploi. En France, la dynamique de réindustrialisation est freinée par la disponibilité des ressources humaines.

« En France, les tensions, voire les pénuries, sur le recrutement deviennent un facteur limitant de la réindustrialisation. L’attractivité des filières, couplée à une offre de formation performante, sont des enjeux forts du renouveau industriel. » Gwénaël Guillemot, Directeur de l’Institut de la réindustrialisation.